LA COUR DE JUSTICE DE LA CEDEAO ORDONNE LA LIBERATION IMMEDIATE ET INCONDITIONNELLE DU PRESIDENT NIGERIEN BAZOUM

La Cour de Justice a émis, le 15 décembre 2023, une ordonnance exigeant la libération immédiate et inconditionnelle du Président nigérien, Mohamed Bazoum. Celui-ci avait été destitué du pouvoir le 26 juillet 2023 et maintenu en résidence surveillée depuis lors.

Dans l’arrêt prononcé par le Juge Gbéri-Bè Ouattara, la Cour a statué que l’État du Niger avait enfreint le droit des requérants à la liberté d’aller et venir, ainsi que leur droit à ne pas être arrêtés ni détenus arbitrairement. De plus, elle a conclu que le Niger avait également violé les droits politiques de Monsieur Mohamed Bazoum, en plus d’enfreindre les principes de convergence constitutionnelle.

En conséquence, la Cour a émis une ordonnance enjoignant au défendeur de rétablir immédiatement l’ordre constitutionnel, notamment en libérant les requérants et en remettant le pouvoir d’État à Mohamed Bazoum.

Dans l’affaire ECW/CCJ/APP/36/23, les requérants, Mohamed Bazoum, son épouse Hadiza Ben Mabrouck et leur fils Salem ont, le 18 septembre 2023 déposé une requête devant la Cour, alléguant que l’État du Niger avait violé leurs droits fondamentaux, notamment le droit d’aller et venir, le droit de ne pas être arrêtés ni détenus arbitrairement, et les droits politiques de Mohamed Bazoum. Ces violations résulteraient du coup d’État militaire survenu le 26 juillet 2023, renversant l’ordre constitutionnel en place. Mohamed Bazoum, élu président en 2021, aurait été déposé, et les requérants, dont lui-même, ont été arrêtés et placés en résidence surveillée au sein du camp de la garde présidentielle. Malgré les appels internationaux, ils demeurent sous le contrôle de la junte militaire. Les requérants demandent à la Cour de constater ces violations et d’ordonner leur libération, tout en enjoignant au défendeur de rétablir l’ordre constitutionnel.

Dans sa défense du 19 octobre 2023, le Niger explique qu’un coup d’État a renversé Mohamed Bazoum le 26 juillet 2023, plaçant le Conseil National pour la Sauvegarde de la Patrie (CNSP) au pouvoir. La Constitution a été suspendue, et les institutions de la République ont été dissoutes. Le 10 août 2023, un gouvernement dirigé par Ali Mahamane LAMINE ZEINE a été formé avec l’appui de la population. Les autorités militaires, conscientes de l’effervescence populaire réclamant justice ont mis les requérants, y compris Mohamed Bazoum, en résidence surveillée pour les protéger. Le défendeur affirme que cette mesure vise à prévenir des actions populaires contre les anciens dignitaires du régime déchu et soutient que certaines personnalités de l’ancien régime, dont Mohamed Bazoum, ont été placées en détention préventive dans le cadre de décisions transmises aux autorités judiciaires. Cependant, il nie que l’épouse et le fils de Mohamed Bazoum aient été inquiétés, contrairement aux allégations de la requête des requérants.

La Cour a souligné que le droit à la liberté d’aller et venir est un droit fondamental de l’homme. Elle a observé que les requérants sont actuellement retenus au palais présidentiel, où ils sont privés de leur liberté de mouvement depuis le coup d’État perpétré par la junte militaire. La Cour a jugé que les restrictions imposées par le défendeur au droit des requérants d’aller et venir librement ne reposent sur aucune base légale, constituant ainsi une violation de leur droit à la liberté d’aller et venir.

De plus , la Cour a noté que l’arrestation des requérants le 26 juillet 2023 était directement liée au coup d’État perpétré par les militaires. De plus, elle a souligné que les requérants n’ont pas été informés des motifs de leur arrestation. La Cour a conclu que les requérants n’ont jamais été conduits devant une autorité judiciaire dès leur arrestation.

Par ailleurs, la Cour a constaté que le Niger est un État démocratique où aucun moyen anticonstitutionnel d’accès au pouvoir d’État n’est toléré. La Cour est d’avis que le coup d’État survenu le 26 juillet 2023 constitue une violation des dispositions de l’article 1er du Protocole sur la démocratie et la bonne gouvernance, qui stipule la subordination de l’armée aux autorités civiles.

Ont aussi siégé les juges  Edward Amoako Asante (Président du panel) Ricardo Claúdio Monteiro Gonçalves, Membre.