LA COUR DE LA CEDEAO RENVOIE AU 23 NOVEMBRE 2023 UNE AFFAIRE CONCERNANT LA NÉGLIGENCE PRESUMÉE DU GHANA À L’ÉGARD DE MIGRANTS DISPARUS

La Cour de la CEDEAO a ajourné au 23 novembre 2023 son audience dans l’affaire d’un ressortissant ghanéen accusant l’État de ne pas avoir enquêté sur la disparition en 2005 et le meurtre présumé de son père en Gambie.

Le juge Edward Amoako Asante a pris la décision, lors de la séance du 12 octobre 2023, de permettre aux avocats de la République du Ghana de régulariser leurs pièces de procédures.

Isaac Mensah, requérant dans l’affaire ECW/CCJ/APP/47/20, a déclaré à la Cour que son père, Peter Mensah, et 43 autres migrants ghanéens ont quitté le Sénégal pour l’Europe, mais n’ont plus jamais été revus. Un survivant, Martin Kyere, a ensuite révélé leur arrestation en Gambie.

Mensah a également déclaré à la Cour qu’une enquête conjointe ONU/CEDEAO de 2008 avait confirmé le meurtre présumé de certains migrants tandis que d’autres étaient portés disparus.

Le requérant a déclaré que, sans impliquer les familles des victimes, les deux pays ont conclu un protocole d’accord dans lequel la Gambie déclinait toute responsabilité mais acceptait d’indemniser les familles. Il a déclaré que, par la suite, le Ghana avait procédé à un enterrement de masse pour certains corps restitués sans enquête officielle et avait ensuite indemnisé 27 familles avec 10 000 cedis (6 800 dollars) chacune.

Mensah a en outre affirmé que la famille n’avait plus jamais entendu parler de l’affaire, malgré le fait qu’en juillet 2019, deux anciens soldats avaient avoué que les migrants avaient été tués sur ordre de Yaya Jammeh, ancien président de la Gambie.

Il a, par ailleurs, affirmé que le défendeur a violé le droit à l’information puisque sa famille a écrit plusieurs lettres au gouvernement ghanéen pour demander des documents liés aux circonstances des événements, sans réponse.

Mensah a exhorté la Cour à tenir le Ghana pour responsable de la négligence des mesures d’enquête et de réparation appropriées. Il a demandé que la Cour ordonne une enquête officielle, la divulgation des documents requis et une indemnisation de 1 500 000 dollars américains.

Dans sa réponse, le Ghana a souligné que les crimes avaient eu lieu en Gambie et dépassaient donc sa juridiction, invoquant les principes de souveraineté.

Le défendeur a déclaré que la coopération internationale était nécessaire pour enquêter sur des crimes extraterritoriaux. Il a ajouté que des contacts avaient été pris et qu’un accord était en place avec la Gambie pour obliger les auteurs à rendre des comptes. L’état ghanéen a également pointé du doigt l’équipe d’enquête ONU/CEDEAO dont les deux pays étaient membres et dont le rapport a abouti à une compensation financière de la part de la Gambie aux familles.

Concernant les droits à l’information, le Ghana a affirmé que certains détails du rapport nécessitaient des dérogations en raison de leur caractère confidentiel ou des répercussions potentielles.

Dans sa conclusion, l’État défendeur a imploré la Cour de reconnaître le caractère unique de cette affaire et de reconnaître les efforts qu’elle déployait pour garantir une enquête.

Le panel des juges comprenaient aussi les Honorables juges Gbéri-bè Ouattara et Ricardo Cláudio Monteiro Gonçalves.